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Paranoid Black Sabbath

Le top 100 de Ricardo # 9
Paranoid, Black Sabbath
Publié le 11 juin 2023
Vues 1,200
republié 17 novembre 2023 

Par Ricardo Langlois

Black Sabbath, Paranoid, 1970

Été 1970, la paranoïa est dans l’air.C’est le début d’un temps nouveau. Black Sabbath invente un nouveau style de musique, du heavy metal plus lourd que Deep Purple et Led Zeppelin. Une nouvelle révolution pour des milliers de jeunes à travers le monde entier. Ce sera mon premier disque. 50 ans plus tard, j’achète le même vinyle

En moins d’un an, la vision de Woodstock d’une société plus bienveillante s’est transformée en cendres. Les œillets placés dans les canons de fusil par les manifestants vietnamiens n’ont pas ralenti l’expédition des sacs mortuaires. Les adversaires de la guerre froide se rapprochent de leurs boutons nucléaires. Pendant ce temps, au milieu des cratères, des décombres et des gangs errants d’Aston de Birmingham, les membres de Black Sabbath ressentent l’esprit du temps.

« J’avais peur que nous soyons entraînés au Vietnam et la troisième Guerre mondiale semblait être un événement très réel », a déclaré le bassiste et parolier de Sabbath, Geezer Butler, un demi- siècle plus tard. « J’étais vraiment dans le flower power dans les années soixante. Je suis allé aux love-ins à l’abbaye de Woburn en 1967 et 68, avec du kaftan, des perles et des fleurs dans les cheveux. Mais au moment où nous avons écrit l’album Paranoid, la réalité s’était installée. Beaucoup de mes paroles étaient ma déception que l’ère de l’amour n’était qu’une chimère. Les amours et les protestations ont été vaines. »

1968 – Geeser Butler 

Le sabbat avait déjà mis un peu de distance entre eux et la réalité. Malgré les meilleurs efforts d’une presse rock sournoise et d’une industrie du disque apathique, le premier album éponyme du groupe a été un succès transatlantique, atteignant le n°8 au Royaume-Uni et le n°23 aux États-Unis. Mais avec les poignards médiatiques tirés et la menace de la conscription sur les cartes – ou pire encore, un retour dans les abattoirs et les usines de soudure dont ils venaient de s’échapper. Butler, le guitariste Tony Iommi, le batteur Bill Ward et le chanteur  Ozzy Osbourne couraient toujours aussi fort qu’ils le pouvaient.

1969

Paranoid décortiqué

Mais, dû à une situation américaine assez préoccupante (le bourbier du Viêt-Nam), l’album se nommera finalement Paranoid, d’après le morceau éponyme symptomatique du « riff qui tue » et simple qui cartonne des deux côtés de l’Atlantique. Mais si, en effet, le riff de Paranoid est un véritable appel aux instincts primaires, que dire de celui d’Iron Man, peut-être bien le meilleur titre du Sabbath ? Une intro pesante qui met en truc qu’on jurerait avoir entendu toute sa vie, alors qu’il n’en est rien. Ça relève du subconscient, ça. Le reste du titre n’est que succession de moments de bonheur. Monstrueux.

Vous en voulez encore, du riff orgasmique ? Vous allez avoir votre dose avec Fairies Wear Boots, (1) le type même de morceau qu’on devrait se mettre au réveil, histoire d’avoir la joie de vivre toute la journée. Est-il nécessaire de préciser qu’Ozzy chante comme un dieu sur ce titre ? Moins fort, mais tout aussi bon: Hand Of Doom, sa basse meurtrière et sa rythmique quasi-jazz, puis ce break salvateur qui remet les points sur les i: « alors, mon petit, on est fou avec les seringues ? Tu vas voir ce qu’il t’en coûte… » Eh oui, pour le coup, la bande à Iommi se la joue anti-héroïne. Ce qui ne les empêchera pas de vanter les mérites de la marie-jeanne ou de la poudre blanche sur les albums suivants… Fin de la parenthèse. Et Electric Funeral ? Vous avez déjà goûté au break d’Electric Funeral ? Cette parenthèse quasi-funky au milieu de ce titre impressionnant de lourdeur (dans le bon sens du terme) est absolument jubilatoire… (quand Iommi fait « chanter sa guitare », raaaah…) Ça balance, ça ne prend pas de gants et c’est trop bon.

La pierre angulaire du métal

Selon la revue Les légendes du rock, (2) cet album est considéré à juste titre comme la pierre angulaire du métal. Il a influencé tout le monde, de Van Halen à Megadeth (qui a repris la chanson titre) en passant par Pantera ( pour sa reprise de Planet Caravan). Comme le souligne Rob Halford, de Judas Priest, dans les notes du coffret Super Deluxe : « Paranoid a fait entrer le monde dans un nouveau son et sur une nouvelle scène. »

« C’est vrai mais l’influence du disque s’étend beaucoup plus loin. Il est cité dans comme une référence aussi diverse que les Foo Fighters, Faith No More et The Replacements. Paranoid tient encore la route aujourd’hui, dit Butler. Parce qu’il a été enregistré à l’état brut. Il n’y a pas de gimmick ou d’astuce qui rend l’album obsolète. Il n’y avait pas de place pour le doublement de piste et de prises multiples… Serions-nous restés longtemps en studio ? »

« L’album aurait été surproduit. Je pense que la plupart des groupes de heavy metal actuels considèrent Paranoid comme une influence majeure. Iron Man est un riff amusant à apprendre lorsque vous jouez sur votre première guitare (3) . « Dans l’école de ma petite fille, en Californie, c’est un élément de base en cours de musique. Quand elle a dit que son grand-père faisait partie de Black Sabbath, son prof ne l’a pas crue. »

Un autre point important. Paranoid est un album sur la tragédie humaine de l’époque.La guerre du Vietnam, la santé mentale, la violence des skinheads de droite. Les sujets explorés sur les huit titres de l’album sont à la fois de leur temps et invariablement prémonitoires. Ils peuvent correspondre à n’importe quelle époque.

Hit stoner éternel

Suite au succès de Black Sabbath (leur premier), Paranoid est publié 7 mois plus tard et voit le groupe s’enfoncer dans sa veine horrifiante. Merci à la cocaïne qui a eu des effets positifs sur l’imagerie mentale. L’album est sorti le 18 septembre 1970, le jour de la mort de Jimi Hendrix, il s’agit d’un talisman à l’imagerie apocalyptique. Paranoid a été enregistré en trois jours. C’est l’album de mon adolescence, mon tout premier album. C’est l’album du weed et des poètes maudits…

Les paroles ont été composées en cinq minutes. Paranoid deviendra un hit stoner éternel, mais aussi le seul album à être en tète des charts. Ce n’est que 43 ans plus tard, avec la sortie de 13 que le groupe retrouvera la place qui lui est due. Totalement inattendue au milieu du déluge.

Face A

1. War Pigs 7:55
2. Paranoid 2:47
3. Planet Caravan  4:24
4. Iron Man 5:53

Face B

5. Electric Funeral 4:47

6. Hand of Doom  7:07
7. Rat Salad 2:29
8. Fairies Wear Boots  6:13

Notes

(1). Fairies wear Boots, chanson mentionnée dans mon deuxième recueil de poésie Musique des sphères.
(2). Revue Les légendes du rock, juin 2021 pour la traduction Les temps obscurs de Henry Yates.
(3). À l’adolescence, je voulais jouer du Black Sabbath et du Harmonium. Une expérience traumatisante pour moi. J’avais un prof qui était en amour avec moi.

Ricardo Langlois est analyste musical pour Famillerock.com et critique littéraire pour Lametropole.com. Il a publié 5 livres de poésie.

 

BANNIÈRE: DANIEL MARSOLAIS
WEBMESTRE: MARCO GIGUÈRE
RÉDAC’CHEF: MURIEL MASSÉ
ÉDITEUR: GÉO GIGUÈRE

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