Rob Halford, Confess
Autobiographie
Talent Éditions 395 pages
Publié le 7 juin 2021
Par Ricardo Langlois
Rob Halford
Rob Halford, le légendaire chanteur de Judas Priest. Je m’en doutais depuis la première fois que je l’ai vu pour le show Screaming for Vengeance (1), je savais qu’il était gai. Tant de désirs, de démons intérieurs pour être dans cette vie. Moi, qui écris ses mots, j’étais un enfant qui se cachait dans le silence et les livres. La solitude, parce que vous êtes différent et unique. La question fondamentale : comment j’ai pu survivre à tant d’absence ? Je devinais la joie dans l’ombre de Dieu. Black Sabbath, Pink Floyd, Harmonium m’ont aidé à tenir le coup. Dieu est un faible. Il laisse faire la guerre, les injustices. Je rêvais d’Ozzy Osbourne, de guitares… Je recopiais les chansons d’Harmonium.
Des anecdotes
Le soleil avait planté son épée d’or sur mon corps d’ado. J’ai rêvé qu’un garçon me prenne dans ses bras. Le sommeil, je l’ai cherché pendant toute mon adolescence. J’ignorais qu’on pouvait aimer un garçon. C’est grâce à sa sœur cadette, Sue, qui l’amènera à une audition pour Judas Priest. À partir de là s’enchaînent les événements d’une vie bien remplie. Des anecdotes : on y apprend que Angus Young ne tient pas l’alcool, Iron Maiden, (Rob était amoureux du chanteur Paul Di’Anno). Et le look ? Le plus grand mythe à propos de cette tenue de scène, est-ce que j’aurais conçu cette image comme une couverture et comme un échappatoire pour ma sexualité, que je prenais mon pied à me déguiser sur scène comme j’aimais le faire dans la rue ou dans ma chambre (p.121).
Sur ce, cette idée me semble ambigue. Mais, je ne m’en cache pas. Le look métal, je l’ai eu, c’était pour montrer qui j’étais. Le manque de sommeil, c’est un autre point commun avec Rob. N’oubliez pas qu’à l’époque de Pop Rock, j’écrivais en arrivant à la maison. Je devais mettre de l’ordre dans mes notes et mettre tout ça sur papier avec une bonne vieille dactylo. Saviez-vous que Gene Simmons et Paul Stanley adoraient Judas Priest ? Jouer trente minutes avant Kiss, cela donne une bonne visibilité. Gene Simmons sortait avec Cher, une icône pour les gays (p. 142). Les gars d’AC/DC étaient adorables, c’étaient vraiment des types généreux d’une charmante compagnie. Bon Scott et moi, c’était comme une maison en feu (p. 145).
1974
Rob parle de la dure réalité des jeunes
En écrivant les paroles de Breaking the Law, il essayait de se mettre dans la tête des jeunes en chômage. Beaucoup de fermetures d’usines, le chômage partout en Angleterre. J’étais complètement dévasté, sans travail et déprimé – there I was completely wasted out at work and down. Il voyait le désenchantement, la colère et l’anarchie. Pour Metal Gods, Rob s’est inspiré du robot géant sur la pochette de Queen, News of the World, ainsi que de La guerre des Mondes et de la science-fiction qu’il adorait. Un travail d’alchimiste. Nous avions composé, enregistré, produit, mixé et masterisé British Steel en 30 jours. Rob est aussi un collectionneur. Dans son placard, il y avait toutes sortes d’objets des Beatles, de Lennon. Des photos, des disques d’or (?) Et puis, il faut bien parler de la New Wave British Heavy Metal. Les groupes phares qu’il mettait en avant étaient Iron Maiden, Def Leppard, Motorhead, Saxon, Samson… et Judas Priest (p. 152).
Freddie Mercury dans un bar gay
Pendant la tournée avec Maiden, nous assistons à une scène intimiste avec Di’Anno. Nous étions bourrés. On est allés dans ma chambre pour continuer de boire… Mais, il avoue qu’il était trop saoul pour essayer quoi que ce soit. En dehors de ça, à l’extérieur de cette chambre, j’étais Rob Halford de Judas Priest, talisman macho et dieu émergeant du métal. À l’intérieur, j’étais Robert J. A. Halford, un type triste et perdu du Black Country (p. 156). En 1980, il rencontre Freddie Mercury dans un bar gay. Il avait des sentiments partagés envers lui. Il n’était pas sûr de ses sentiments. Freddie Mercury chantera plus tard qu’il voulait se libérer (I want to be Free). Il dira quelque chose qui le définit bien : Je ne me plains pas. C’était la vie que j’avais toujours voulue, et, je me voyais toujours tel un missionnaire, à répandre la parole du métal (p. 162).
1980
Son premier amour (Intermède)
Il s’appelle David. Il passait du bon temps ensemble. Habitant à Phenix depuis plusieurs années, il connaissait les meilleurs bars et clubs pour sortir. Les deux partageaient vin et whiskey. Rob n’était pas sûr si David était vraiment amoureux de lui. Pourtant à certaines occasions, David se comportait comme si ils étaient en couple. Pendant ce temps, l’Amérique devenait dingue de Judas Priest alors que le groupe s’est retrouvé en Pennsylvanie en août 82 pour lancer leur tournée qui devait durer sept mois. Screaming for Vengeance se vendait comme de petits pains (p. 179 ). Et le fan base’s ? Ce n’étaient plus des headbangers masculins. D’un coup des filles au look Madonna nous faisaient des clin d’œil (p. 181). Il y a des épisodes bizarres. Si son copain David n’était pas la solution, il y avait des vidéos gay. Sur scène, Rob lançait des messages sur scène : le petit foulard dans la poche de derrière était un symbole de l’époque.
Le US Festival
Le Us Festival de 1983 est considéré comme un moment historique. Avec Priest, Motley Crüe, Ozzy, Scorpions et Van Halen. La tète d’affiche était Quiet Riot qui était no 1 aux États-Unis. Le public ? 250 000 personnes. Le Woodstock du Métal, rien de moins. Les groupes arrivaient par hélicoptère. C’était comme Woodstock 1969. Judas Priest méritait d’être là. Sous un soleil de plomb, j’ai fait vrombir ma Harley sur scène et nous avons envoyé Electric Eye. Ceci est le rêve ultime… Au sommet. Et pourtant ? Je me mets dans sa tète, Rob était toujours dans l’ombre de lui-même. Il couche avec une jeune cowboy mineur (par erreur)… Il marche sans trêve. Il piétine sur son cœur. Je le vois faire le tour du monde mais avec un cœur vide. Où sont les roses? L’existence merveilleuse du rock star. J’ai pensé à Christian Bobin : Il faut renoncer à être heureux pour entrer au paradis (2) Je reviens à ma réflexion : pourquoi être ailleurs qu’être heureux avec Soi ? Le malheur, pour ceux qui veulent tout donner… À Châteauguay, j’écoute Judas Priest, comme une fête d’enfants qui s’étire dans les jours heureux. Les années passent et j’y pense encore. Au-dessus du petit monde tranquille (3), Rob aimait les hommes en uniforme, une phrase qui tombe du livre à la page 200.
L’année 1985
Rob, en 1985, s’achète une petite Corvette rouge et Ricardo conduit le truck rouge de mon meilleur ami (je suis a Saint André d’Argenteuil avec Denis, un des fils de Gilles Vigneault et mon copain depuis 1980). Rob est toujours avec son amoureux David. Une relation amoureuse sans sexe mais interdépendante. David fréquente une femme mais Rob ne tient pas vraiment à le savoir. On le retrouvera dans un bar gay à draguer (sucer dans les toilettes, eh oui !). Le vrai amour ? Il y a un nouveau personnage, Brad qui débarque. C’est l’amour fou, encore une fois, un amour où à 33 ans, Rob se comporte comme un ado. Toujours dans le doute : est-ce qu’il pense à moi comme je pense à lui ? Est-il seul ? Est-il avec quelqu’un d’autre ? (p. 228 ). Et il y a un autre problème : la coke ! 200 dollars de coke pour un trip d’une heure. Le réveil est brutal. La difficulté de donner son 100% durant la session de Turbo. Même l’inspiration des textes laisse à désirer. Rob n’était plus lui-même. La vie était devenue un enfer. Il a battu son ami Brad à coups de poing au visage. Brad s’est défendu. Il le cognait aussi fort. Plus tard, il avait pris sa décision. Prendre des médicaments (la boîte au complet). Pourtant, la petite voix intérieure est toujours là ( la prière de supplication) : S’il te plait, Dieu, faites que ça s’arrête ! (p. 239 ).
25 années de vie de mensonges à propos de sa sexualité, suivra, une cure et une prise de conscience. Cette recherche est une affaire entre Soi et Soi. L’excès de fusion, de trop de solitude. Des espaces invisibles fabriqués par soi-même. La perfection d’une incarnation idéale. Chacun donne ce qu’il peut (4). Je crois que la tendresse, le dévouement valent mieux que cette misère sexuelle qui l’a amené à un faux sentiment de liberté. J’exprime mon sentiment personnel sur cette vie de rock star.
1986
Painkiller, le Sgt Pepper de Priest
Le grunge débarque avec les années 90. Rob déclare : je continue de penser que Painkiller est le Sgt Pepper de Judas. C’est notre grande référence musicale. Painkiller n’avait aucun temps mort. À part le symphonique Touch of Evil, il ne baissait pas d’intensité du début à la fin. C’est l’album spécial qu’il nous fallait faire, et nous le savions. La chanson titre exprime bien l’album (p. 269 ).
Faster than a laser bullet /Plus rapide qu’une balle laser,
Louder than an atomb bomb / Plus fracassante qu’une bombe atomique
Chromium plated boiled metal / Le métal laqué de chrome en fusion,
Brighter than a thousand suns / Plus brillant que des milliers de soleil.
Notes
(1) Le métal de Judas Priest, compte rendu du spectacle Screaming for A Vengeance, Pop Rock, 30 octobre 1982.
(2) Christian Bobin, Prisonnier au berceau, Folio. Poète et écrivain est devenu mon écrivain préféré en l’an 2000
(3) Journal personnel 2010-2013, notes.
(4) Michel Onfray, Un érotique solaire, La puissance d’exister. Livre de poche 2014
NDLR: Ricardo fut journaliste émérite du journal Pop Rock de 1980 à 1987. Son 3e recueil Septième Ciel est disponible. (Écrivez-lui en privé). 60 pages, 5 illustrations. 10$ argent ou chèque.
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