Spectacles

Heavy Metal Maniac

Heavy Metal Maniac Toujours!
EXCITER avec D.D.T. et INSANE
Le National, Montréal, 7 avril 2018
Publié le 16 avril 2018
Vues 3,300
Republié le 27 août 2021

  Texte : Jérôme Brisson    Photos : Wayne William Archibald

Presque un demi-siècle après que les Zeppelin, Sabbath, Purple et autres Priest aient jeté les bases du genre et contribué à en établir les codes, peut-on à juste titre, aujourd’hui  en 2018, parler d’un patrimoine métal ? – et plus spécifiquement d’un patrimoine métal canadien/québécois ? Et par « patrimoine », j’entends un répertoire d’artistes et d’œuvres qui a non seulement marqué une génération d’adeptes, mais qui a été transmis comme une tradition, avec ou sans l’aide des médias traditionnels, par ces mêmes adeptes directement à la génération suivante qui en assurera à son tour la transmission aux générations futures.

C’est la question qui s’est mise à me trotter dans la tête alors que je m’amusais à deviner la moyenne d’âge des spectateurs qui affluaient à l’entrée du National samedi soir dernier 7 avril 2018, pour la grande soirée Hard and Heavy 80’s qui honoraient des pionniers du genre, à savoir les pères fondateurs du speed/thrash metal, Exciter ainsi que la légendaire formation D.D.T. de Magog et le quatuor culte montréalais Insane. Des 300 à 400 métalleux et métalleuses enthousiastes présents, j’estime à vue de nez qu’au moins la moitié d’entre eux –  et j’y inclus Annick Giroux et Amélie Forget-Dubois, les organisatrices de l’événement! – n’étaient même pas une lueur dans les yeux de leurs parents à l’époque où le power-trio d’Ottawa faisait trembler les fondations du Spectrum pendant que les frères Tougas et la bande de Chriss Lee et Richie Brazz écumaient les bars rock un peu partout au Québec.

Insane

Cependant, peu importe l’âge des spectateurs présents, l’ambiance générale dans la salle était à la fête,  et autant les jeunes blancs-becs et les vieux croûtons que ceux et celles à cheval sur les deux générations prenaient plaisir à discuter, à siroter une bière ou encore à examiner les T-shirts et fureter parmi la pléthore de vinyles, de CDs et de cassettes de collection disponibles  à la table du « merch » tenue par Annick et Amélie. Dans la foule, quelques visages familiers : les gars de Voivod, vieux chums de D.D.T., Vincent Peake de Groovy Aardvark/Grimskunk/ Aut’Chose/Floating Widget et sa douce Morena… À 21 heures pile, après 30 ans de silence, c’est la formation montréalaise Insane qui, partant le bal avec la pièce-titre de son unique album Strip Tease paru en 1987, se met en frais de réchauffer le public du National. Le temps ayant fait son œuvre, les impressionnantes tignasses d’antan ont fait place aux cheveux courts ou même, dans le cas du chanteur-guitariste et du batteur, à un crâne parfaitement lisse qu’ils ont eu la coquetterie néanmoins de recouvrir chacun d’un élégant chapeau haut de forme.

Côté vestimentaire, les spandex jadis de rigueur ont pris le chemin des oubliettes et le quatuor démontrait pour son grand retour sur scène un éclectisme assez déroutant : redingote rouge pour le chanteur-guitariste, uniforme de major de l’armée de l’air pour le bassiste, et jeans et T-shirt pour le second guitariste (le batteur se contentant pour sa part d’une sobre chemise noire).  À part ce bémol sur le plan visuel, un autre détail agaçait : plutôt avare d’interventions entre les pièces, le chanteur-guitariste ne s’est jamais présenté ni n’a présenté aucun des musiciens une seule fois durant la prestation. Avait-on affaire au line-up original?  Y a-t-il eu de nouveaux membres ? Je ne trouve aucun site Web officiel ni page Facebook pour le groupe qui puisse m’informer à ce chapitre, et selon les renseignements que j’ai pu glaner sur son site bandcamp, le bassiste original et membre fondateur Chriss Lee se serait joint au mouvement raëlien et aurait changé de nom et de style musical il y a quelques années de cela, faisant maintenant carrière sous le nom d’Eloha.

 

Reste que les musiciens présents affichaient une forme splendide au niveau de l’exécution, nous offrant de superbes performances aux guitares, notamment de superbes harmonies dans « The Battle » et « Never Satisfied ».  Mais les gars, un conseil d’ami si vous avez l’intention de durer : soignez votre présence dans les médias!

D.D.T.

Un frisson d’anticipation se fait sentir dans la foule aux alentours de 22 heures, alors qu’on s’apprête à célébrer les retrouvailles sur scène de D.D.T. avec son public montréalais, après une attente de presque 30 ans.  Enfin, sous les acclamations des fans de longue date – et aussi des nouveaux fans – apparait le quintette de Magog, formé des frères Tougas (François au chant, Paul à la guitare solo et Pierre à la basse), du jeunot Philippe, fils de Pierre, à la seconde guitare solo (First Fragment, Chthe’ilist et Funebrarum) et du nouveau batteur Nicholas Wells, lui aussi un jeune loup, qui a dû remplacer au pied levé le batteur original Sylvain « Syd » D’Arcy qui s’est désisté trois semaines avant le spectacle.

Dès les premières salves de « In The Name of God », la magie opère, la connexion se fait, comme dans le temps. Le son est parfaitement balancé et les jeux de lumière au point. Les trois frères ont grisonné, pris un peu de ventre, c’est sûr, mais tous les musiciens jouent « sur la coche ». Toutefois c’est la performance vocale de Frank qui suscite la stupéfaction des fans de la première heure; le temps semble n’avoir eu aucune emprise sur sa capacité à atteindre et à soutenir les notes suraiguës les plus délirantes. Durant « Metal on Ashes », un moment de folie et d’humour s’empare de quelques spectateurs et spectatrices à l’avant-scène, qui se mettent à bombarder les musiciens sur scène de petites culottes et de strings multicolores… De quoi concurrencer Tom Jones!

Le groupe jouera la presque-totalité de son unique mini-album officiel Let The Screw… Turn You On!, à l’exception de « Wasted », puisant le reste des pièces de leur prestation de près de 50 minutes dans leurs quatre premiers démos. Entendre ces riffs et ces solos de guitare, composés et enregistrés il y a trois décennies et interprétés sur scène aujourd’hui par Paul Tougas et son neveu Philippe, deux guitaristes de générations différentes, nous permet de constater à la fois la complémentarité et le contraste entre les deux approches en ce qui a trait aux solos : mélodique et stylisée dans le cas de Paul, frénétique et acrobatique pour le jeune shredder Philippe.

Après avoir dédié « Wall Street Rats » à Donald Trump, le groupe conclura magistralement ses retrouvailles avec un public montréalais en liesse avec « Don’t Wanna Be Like You » (agrémentée d’un mosh pit en avant de la scène!) suivie au rappel par l’incandescente « The Number ». Des retrouvailles qui avaient même toutes les apparences d’une consécration tardive. Irais-je jusqu’à dire qu’ils ont volé la vedette ce soir-là aux pionniers du speed/thrash metal? Du moins, je ne suis pas loin de le penser!…

EXCITER

Lorsqu’enfin, un peu après 23 h 15, on voit apparaître l’imposante batterie de Dan Beehler, aux deux grosses caisses dont les têtes étaient ornées de l’illustration de la pochette de Heavy Metal Maniac, on se rappelle du coup, avec un délicieux frisson d’anticipation, la raison de notre présence dans la vénérable enceinte du National. Pour leur seconde prestation à Montréal depuis leur réunion officielle (ils se sont produits aux Foufounes Électriques en mars 2016), le power-trio a décidé de nous gâter en jouant l’intégrale de leur mythique premier album, en plus d’autres morceaux soigneusement choisis parmi leurs deux autres albums suivants, Violence & Force (1984) et Long Live The Loud (1985).

Arrive sur scène, sous les acclamations orgiaques des métalleux purs et durs, John Ricci, guitare blanche en bandoulière, vêtu de cuir noir clouté comme jadis, qui se lance en guise d’intro dans une séance de torture de son instrument, à grand renfort de dive bombs et d’effets Larsen affolants, pendant que ses confrères Dan Beehler (chant et batterie) et Allan Johnson (basse) se mettent en place. Les connaisseurs auront reconnu « Oblivion » et deviné du coup la pièce qui partira le bal : « Violence & Force » démarre à tombeau ouvert, déclenchant immanquablement un intense mosh pit au parterre.

À l’orée de la soixantaine,

Dan Beehler tabasse encore ses fûts, pousse la note et crache ses paroles avec une hargne et une sauvagerie que lui envieraient de jeunes prétendants du tiers de son âge! Quant à Allan Johnson, qui a adopté la démarche Rob Halford côté look, soit crâne rasé et barbiche, il assure toujours une solide rythmique avec un son de basse bien plombé. Les spectateurs les plus perspicaces auront remarqué qu’il portait sous sa veste de cuir noir entr’ouverte un T-shirt de la jeune formation montréalaise Vantablack Warship, un hommage fort apprécié d’un vétéran du métal à la génération montante.

Après « Sudden Impact » et « Victims of Sacrifice », place aux classiques de l’album Heavy Metal Maniac présentés dans le désordre. « Cry of The Banshee », « Iron Dogs » et « Under Attack » s’enchaînent sans temps mort, Dan limitant ses interventions entre les pièces aux remerciements et à la présentation de la pièce suivante. À voir l’énergie qu’il investit dans sa performance, on comprend qu’Il veuille économiser son souffle! Le refrain de « Stand Up and Fight » se voit scandé en chœur par 400 gosiers enthousiastes, et la ferveur de la foule ne connaîtra aucun répit jusqu’à la pièce-titre de l’album, qui vient conclure la portion  « Heavy Metal Maniac » du spectacle.

Suit un court solo de guitare de John Ricci, qui vient quelque peu casser le rythme du spectacle, sans doute le seul bémol à cette performance  qui jusqu’à ce moment se déroulait à un rythme d’enfer. Avouons-le d’emblée, si le guitariste d’Ottawa s’avère un forgeur de riffs hors pair, son travail au niveau des solos trahit un manque de finesse. Alors que ses confrères de Metallica, Megadeth et consorts peaufinaient leur attaque et ciselaient finement la mélodie de leurs solos de guitare, John préfère encore 30 ans plus tard créer un barrage d’agression sonore, limitant ses solos à une bouillie de notes confuses jouées en trémolo hyperrapide.

Après « Beyond The Gates of Doom » qui vient relever le rythme du spectacle, les vétérans du métal canadiens tirent leur révérence avec « Long Live The Loud ».  Et en guise de rappel, l’intro martiale de batterie de Dan annonce le morceau de bravoure incontournable réclamé à pleins poumons par les fans presque repus aux oreilles bourdonnantes : « Pounding Metal » vient ultimement rassasier pour de bon les métalleux, qui sortiront du National avec un acouphène qui les harcèlera pour les deux ou trois prochains jours!

La transmission du patrimoine métal a ses exigences!…

Liste des chansons

INSANE

Strip Tease –  Sharp Sensations  –   Cry Out  –   Nowhere Land  –   The Battle  –  Heart on Fire  -Never Satisfied

D.D.T.

In The Name of God  –   Where Were You  –   Metal on Ashes  –  Let The Screw Turn You On        Bitches  –  Violence   –  The Whip (Instrumentale)   –   Rumors of War  Victims  –  Fist   –   Wall     Street Rats  –  Don’t Wanna Be Like You   –  Rappel : The Number

EXCITER

Oblivion (Intro)  –   Violence & Force  –   Sudden Impact  –  Victims of Sacrifice  –   Cry of The Banshee  –   Iron Dogs   –  Under Attack   –  The Holocaust (Instrumentale)   –  Stand Up and Fight  –  Black Witch   –  Mistress of Evil  –  Mistress of Evil   –  Rising of The Dead   –  Heavy Metal Maniac   –   Solo de guitare   –    Beyond The Gates of Doom   –  Long Live The Loud     Rappel Rappel :  Pounding Metal

 

INFOGRAPHE: DANIEL MARSOLAIS
WEBMESTRE: STEVEN HENRY
RÉDAC’CHEF: MURIEL MASSÉ
ÉDITEUR: GÉO GIGUÈRE

5 Comments

5 Comments

  1. Jérôme Brisson

    29 septembre 2022 at 9:56 AM

    Test.

  2. Ricardo Langlois..

    17 avril 2018 at 8:38 PM

    Si vous lisiez le Pop Rock en 1984, j’ai parlé du groupe Exciter (sur le label
    Banzai) Dans le livre Sound of Beast paru en 2003 on fait la rétrospective de tous les bands qui ont marqués l’époque des headbangers…L »album Violence and Force
    est mentionné dans une playlist des meilleurs albums power metal…Metallica,Slayer
    et Anthrax ont été les chefs de file…

    Cette époque est fabuleuse…L’aspect scénique illustrant un certain mode de vie…

  3. Jérôme Brisson

    17 avril 2018 at 3:17 PM

    Merci pour vos commentaires et vos précisions, Sergent Dan! Nous prenons note des pages Facebook et Youtube d’Insane pour référence future. Nous vous souhaitons le succès dans tous vos projets futurs!

  4. Sergent Dan

    17 avril 2018 at 11:27 AM

    L’éclectisme de Insane n’apparaissait-il pas dès le début de la formation, alors que chacun des membres avait une personnalité bien typée qui lui était propre?

    Page Facebook de Insane : https://www.facebook.com/InsaneMetalQuebec/

    Page YouTube de Insane : https://www.youtube.com/channel/UCr8zd-FgelECsug30JVsSgQ

    Il manque Forever dans la liste des chansons et celle-ci possède plusieurs couplets en français. Elle fait partie des chansons qui seront sur le prochain album du groupe!

    Merci beaucoup pour la critique, on en tiendra compte!

    p.s. me semble avoir lu «glanés», au lieu de «glaner».

  5. Geo Giguere

    16 avril 2018 at 9:07 PM

    document exceptionel. bravos a Jerome texte et Wayne photos! wow

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