Les Musiciens Méconnus 6
Le Bon Pain de Viande ou Meat Loaf
Publié le 6 juillet 2020
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Republié le 27 septembre 2024
Republié à l’occasion de son anniversaire le 27 septembre 1947. Mais décédé le 20 décembre 2022.
Par Mike Lacombe
Salut à tous, cette semaine, une voix et toute une! De sublimes compositions et des pochettes d’albums que l’on peut qualifier d’œuvres d’art. Je vous présente, Meat Loaf!
Meat Loaf, c’est en fait le nom d’artiste ou de groupe, selon les besoins du moment de Micheal Lee Aday (prononcez Adé) et du prolifique compositeur Jim Steinman.
Les cheveux (Hair) et les bas de nylons (The Rocky Horror Picture Show)
Meat Loaf est un chanteur/comédien natif du Texas, qui s’est fait connaitre par sa voix incomparable qui est de trois octaves, dit-on, mais selon la légende, elle serait de 4 octaves. Il débuta sa carrière professionnelle dans la production californienne de la revue musicale Hair vers la fin des années 60. À cette époque, il était en duo avec un des comédiens de Hair, Shaun Stoney Murphy, le duo qui se faisait appeler Stoney and Meat Loaf firent les frais de premières parties des groupes comme The Who, The Stooges, Bob Seger, Alice Cooper et Rare Earth. Fort du succès qu’il avait connu avec Hair, celui-ci ira auditionner pour différents rôles dont celui de Eddie et du Dr.Scott dans la production théâtrale de The Rocky Horror Picture Show. Il y obtiendra le rôle.
Cette pièce de théâtre fortement inclusive du public (les gens se déguisaient en travestie pour y assister) fut tellement bien reçue par une communauté largement marginale et presque tabou, qu’un film fut réalisé mettant en vedette Susan Sarandon, Tim Curry et Meat Loaf. Le même esprit envahit les cinémas lors des projections du film et encore aujourd’hui, si le film est présenté sur grand écran, les spectateurs sont toujours aussi interactifs et travestis. Le tout emprunt d’une trame sonore qui marquera les tout débuts du Glam Rock. On a qu’à penser à des titres comme Sweet Transvestite ou Over at The Frankenstein Place pour comprendre à quel genre de spectacle l’on pouvait s’attendre.
Rencontre de Jim Steinman et création du génial album Bat Out Of Hell
Lors d’une audition pour une pièce de théâtre Off-Broadway début des années 70, et cela même s’il avait décidé de ne se concentrer que sur la musique, il fit une rencontre fortuite avec le compositeur Jim Steinman. Cette rencontre en sera une des plus fructueuses pour les deux partis. Ils commencèrent à travailler sur un concept d’album, Bat Out of Hell, qui deviendra un des plus gros vendeurs de tous les temps avec un peu plus 50 millions de copies vendues. Le concept d’album fut élaboré vers 1972-73, mais ne fut réalisé que vers 1975-76 et ne vit le jour qu’en 1977 après maintes et maintes recherches d’un contrat de disques. Le grand Clive Davis de CBS Records alla même jusqu’à affirmer que Steinman « ne savait pas écrire de chansons rock, et qu’il devrait plutôt se concentrer sur l’écriture de musique pour les comédies musicales de Broadway ».
Ils furent finalement signés sur une toute petite et nouvelle étiquette, Cleveland International Records. Cette étiquette publiera au fil du temps des artistes comme, BJ Thomas, Ronnie Spector, Slim Whitman, pour en nommer que quelques-uns. Cette étiquette deviendra même une étiquette qui ne signera que des artistes de Polka ! Heureusement, depuis 2006 le fils du fondateur a repris le contrôle de la compagnie et ils signent maintenant des artistes Rock.
L’album Bat Out of Hell a tout ce qu’un adolescent de la fin des années 70 rêvait. Un producteur de grand calibre en Todd Rundgren, des textes élaborés et parfois même vertigineux, des musiques de tous styles qui se mélangent les unes aux autres avec une réussite peu commune et des voix, toujours plus de voix. Meat Loaf est au meilleur de sa forme vocale, il chante à tue-tête, il crie, il se lamente et il parvient à mettre le feu aux poudres à chaque interprétation. On y parle d’un amour impossible (Two Out of Three Ain’t Bad), on y découvre la sensibilité de Meat Loaf dans le céleste (Heaven Can Wait), on verse des larmes en écoutant les paroles déchirantes de cet hymne à l’amour qu’est For Crying Out Loud. On part à la recherche du party du samedi soir avec un jeune qui voudrait bien être dans le groupe des Cool Kids, mais qui ne peut qu’y rêver avec All Revved up With no Place to Go. On ressent une pulsion sexuelle intense dans Paradise by the Dashboard Light quand la choriste Ellen Foley qui a une répartie incroyable, lui crie ‘’Do you love me, will you love me forever‘’ et Meat Loaf de lui répondre ‘’Let me sleep on it Baby baby, Let me sleep on it’’ du vrai théâtre Rock and Roll !
On passe par toutes les gammes de sonorité dans cet album. Les balades comme seul Jim Steinman peut mettre sur papier, de grandioses compositions, des rock rapides qui brassent sans arrêt et tout ça sous la surveillance magistrale de Tod Rundgren. Rarement un album rock peut avoir l’effet que cet album a eu, mais Bat Out of Hell a réussi à le faire naturellement. Un album qui forcément est dans mes 50 meilleurs albums à vie. Il n’a pas d’âge et comme le bon vin, il vieillit très bien. Recommandation spéciale de ma part aux plus jeunes qui n’aurait pas eu la chance de le vivre à cette époque. Gardiens du Rock oblige…
Tournée – Retour- Poursuite judiciaire
Meat Loaf fera une apparition dans une pièce de théâtre qui ne fut pas très longtemps à l’affiche et lorsqu’il revint de tournée, Jim Steinman se mit à l’écriture de l’album Bad For Good. Il retrouva un Meat Loaf épuisé par la tournée, la drogue et l’alcool, et il en perdit même sa voix. Steinman décida qu’il était pour sortir l’album mais que cette fois-ci, ce serait lui qui en serait l’interprète. Il écrivit le nouvel album de Meat Loaf, Dead Ringer, qui vit le jour après la sortie du disque de Steinman. Entre temps, Meat Loaf retrouva la voix et joua même dans le film Roadie (1980).
Dead Ringer fut mis sur le marché suivi d’une comédie/documentaire pour promouvoir l’album. Une poursuite judiciaire entre les deux grands amis Meat Loaf et Steinman rendirent la relation extrêmement tendue, mais contractuellement Meat Loaf devait faire un autre album, donc il se résigna à travailler de nouveau avec Steinman. La poursuite judiciaire stipulait que Jim Steinman avait promis à Meat Loaf les chansons Total Eclipse From The Heart popularisé par Bonnie Tyler, et Making Love Out of Nothing at All grand succès du groupe Air Supply. Ces chansons qui ont été déterminantes dans la carrière de ces artistes, lui avait été promis par Steinman selon Meat Loaf pour son nouvel album. Plus tard, ils diront tous les deux que la poursuite en était une d’avocat contre avocat, et qu’eux ne s’étaient jamais poursuivis en justice.
Deux albums et le retour de Steinman
Milieu des années 80, Meat Loaf sortit 2 albums sans trop de succès commercial. Le premier Bad Attitude, qui comprenait deux chansons de Steinman, qui avaient auparavant déjà été enregistrées et le second Blind Before I Stop, qui pour la première fois depuis Bat Out of Hell, ne comprenait aucune composition de l’incomparable Jim Steinman.
Selon Meat Loaf, pour Bad Attitude, les compositions de Steinman se faisant trop attendre, il regarda du côté de différents autres compositeurs pour l’aider à concrétiser l’album. Quant à lui l’album Blind Before I Stop est maintenant devenu une sorte d’album culte au sein de la légion de fans de Meat Loaf, et cela même si le son en est un typiquement des années 80. L’auteur, compositeur et interprète John Parr (St. Elmo’s Fire) participe à quelques chansons sur l’album, y allant même d’un duo avec Meat Loaf sur la chanson Rock & Roll Mercenaries. L’album fut produit par Frank Farian, producteur et chanteur studio du groupe Boney M et de Milli Vanilli, (oui oui les faux chanteurs).
Le but ultime de Steinman avait toujours été de sortir une suite à Bat Out of Hell, mais la maison de disques et même son gérant Tommy Manzi disait que ce serait impossible de recréer un engouement comme celui que Bat Out of Hell avait réussi à créer. Malgré une relation ambivalente et faisant fi des commentaires négatifs, Steinman contacta Meat Loaf dans le but de sonder son intérêt et surtout sa perception d’une suite à Bat Out of Hell. Ils se mirent de nouveau à travailler ensemble.
Les compositions de Bat Out of Hell II : To Hell And Back qui sont toutes de Jim Steinman et la production soutenue par Desmond Child (auteur-compositeur-interprète, producteur, et membre du Rock And Roll Hall Of Fame) ayant composé des hits tel que : I Was Made For Loving You de Kiss, You Give Love A Bad Name, Living On A Prayer de Bon Jovi, Dude Look’s Like A Lady, Angel, What It Takes, et Crazy d’Aerosmith, et d’une panoplie d’autres en passant de Joan Jett and The Blackhearts, à Alice Cooper et Ricky Martin, ont fait de cet album produit magistralement par Desmond Child, l’album qui permettra à Meat Loaf d’être consacré Best Rock Vocal Performance Solo aux Grammy’s de 1994 grâce à la très belle I’d Do Anything For Love Pour un album qui d’après plusieurs grands penseurs allait être un flop monumental, l’album à ce jour a presque vendu 15 millions d’exemplaires. Pas mal pour un album rejet.
Deux autres albums ont suivi : Welcome to the Neighbourhood et l’album Couln’t Have Said It Better que même si l’on peut dire de ces albums qu’ils sont bien ficelés et superbement bien produits, la magie de Bat Out of Hell ne s’y retrouve pas. Ce qui nous amène au dernier chapitre des Bat Out Of Hell avec l’album, Bat Out of Hell III : The Monster Is Loose. Comment expliquer une trilogie musicale qui lorsqu’elle en est rendue à la toute fin, puisse encore être excellente et cela même si 30 ans s’était écoulés entre le premier Bat Out of Hell et le dernier qui fut mis sur le marché en 2006.
L’explication reste toujours la même lorsque l’on parle de Meat Loaf. Les textes, la musique, le choix des auteurs-compositeurs, la production, et les superbes voix de Meat Loaf, de Patti Russo, sa choriste de longue date et des voix invitées (Guest Singer), Marion Raven et Jennifer Hudson. On remarque quelque chose de nouveau au sein de cet album, Jim Steinman pour la première fois depuis le début de l’aventure des Bat, ne sera pas impliqué au niveau de la production de l’album. Celle-ci sera laissée entièrement à Desmond Child. De plus, les 7 chansons de Steinman sont des compositions n’ayant pas été composées pour cet album. Elles proviennent toutes de différents projets. Cela s’explique du fait que Steinman un peu avant le troisième Bat, avait fait incorporer (trade mark) la phrase Bat Out of Hell à son nom et le litige qui les opposait rendait Meat Loaf furieux.
D’ailleurs, il y a sur cet album une chanson de Steinman qui a déjà été chantée par Céline Dion, It’s all Coming Back To Me. Meat Loaf et la chanteuse Marion Raven y font une version vraiment incroyable, n’en déplaise aux fans de Mme Dion. Il y a aussi la sublime chanson de l’auteure-compositrice Diane Warren, Cry Over Me. Une larmoyante et touchante chanson qui parle d’une peine d’amour vraiment difficile à vivre et qui peut vous rappeler vos propres peines d’amour. Dans le milieu artistique, Diane Warren est considérée comme la reine de la ballade. Le titre lui va très bien, vous en conviendrez en écoutant cette pièce de toute beauté.
Pochettes Œuvres d’Art
En terminant, je ne peux passer sous silence les merveilleux dessins qui ornent les pochettes des albums de Meat Loaf, qui toutes d’après moi se doivent d’être élevées au niveau d’Oeuvres d’Art Moderne. Plusieurs artistes ont contribué à la beauté de ces pochettes. Je ne ferai pas ici une nomenclature complète de tous les albums, mais je vous présenterai plutôt les artistes ayant participé à la trilogie Bat Out of Hell. Le premier et très certainement le plus célèbre est l’artiste Richard Corbin, qui lui a signé l’album Bat Out of Hell. Corbin fut responsable de la plupart des dessins de la revue Heavy Metal (Métal Hurlant) et de presque tous les dessins qui ont été utilisés dans le film du même nom.
Bat Out of Hell II : Back Into Hell, a quant à lui été illustré par le célèbre illustrateur de science-fiction Micheal Whelan. Michael Whelan est aussi crédité pour l’album Victory des Jacksons, Beneath The Remains, Arise, Chaos A.D et Roots de Sepultra, pour en nommer que quelques-uns. Il a aussi illustré plusieurs des romans de Steven King.
Le troisième et dernier opus de cette sensationnelle trilogie Bat Out Of Hell III : The Monster is Loose a été magnifiquement illustré par la merveilleuse Julie Bell. Julie Bell est connu des collectionneurs de bandes dessinées, puisqu’avec son mari l’illustrateur Boris Vallejo, elle a illustré et publié bon nombre de livres dépeignant diverses scènes de super-héros et de vilains combattant les uns contre les autres. Elle se décrit comme une Ballerine/Heavy Metal/Cowgirl’du dessin de fantaisie. Ma favorite depuis de nombreuses années.
CODA
Au cours des dernières années, Meat Loaf a offert des concerts dans différentes villes d’Europe et d’Amérique du Nord, mais a dû très souvent reporter ses concerts pour des raisons de problèmes de santé occasionnés par des polîtes sur les cordes vocales et par de l’épuisement physique et mental. Il a toujours été plus apprécié par le public européen que par le public nord-américain. Dur à expliquer, mais tristement réel. Il a aussi participé à plusieurs séries télévisées et quelques films dont le film The Pick Of Destiny (2006), où il y tient le rôle du paternel sévère de JB (Jack Black). Fait cocasse, il n’est pas crédité au générique du film !
Des albums qui font partie de la légende du rock, des compositions monumentales et des pochettes d’albums imprégnées de Rock Hurlant et Pesant.
Voilà ce qu’est Meat Loaf et pour en connaître un peu plus sur lui…
Rock On !
BANNIÈRE: THOMAS O’SULLIVAN
WEBMESTRE: STEVEN HENRY
RÉDAC’CHEF: MURIEL MASSÉ
ÉDITEUR: GÉO GIGUÈRE
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