Mon top 5 de Genesis
Publié le 9 novembre 2023
Par Ricardo Langlois
Top 5 Genesis
The Lamb Lies Down the Broadway, Selling England by the Pound, A Trick of the Tail, Wind & Wuthering et Duke
L’histoire d’amour pour Genesis a commencé pour moi au cégep. Avant, je vivais dans une forêt enchantée avec Black Sabbath, Pink Floyd, Emerson et Alice Cooper. J’avais besoin de cette musique pour vivre. Nous étions plusieurs jeunes à parler et à commenter la musique au Café étudiant du cégep de Longueuil. Dans ma chambre, c’était la fumée de l’encens et ma guitare acoustique qui me traversaient l’esprit. L’adolescence pour moi, c’est la musique. Mon père ne comprenait pas pourquoi je passais autant de temps enfermé dans ma chambre.
C’était aussi la découverte du journal Pop Rock et de Mainmise. La musique a abattu plusieurs murs dans ma tête. Genesis, c’était au cégep, à la radio étudiante. The Lamb Lies Down on the Broadway est écrit comme un livre surréaliste. La lumière qui est dans la voix de Peter Gabriel.
Le spectacle de Genesis au Forum de Montréal en 1978, ca été une expérience surnaturelle pour moi. Ce band a été important pour toute une génération de jeunes. Cette musique (le rock progressif) est une expérience en Soi. Il y a Pink Floyd en grosses lettres puis Genesis aussi fort que le Requiem de Fauré. Genesis,
The Lamb Lies Down on the Broadway (1974)
L’ensemble de l’œuvre raconte l’histoire de Rael, jeune New Yorkais d’origine portoricaine et de son voyage dans des mondes fantastiques imaginés par le chanteur Peter Gabriel… Nietzsche, dans le ‘Gai Savoir’, explique en substance que l’art exige parfois d’accoutumer ses sens à la nouveauté, à une étrangeté qui peut passer pour excentricité voir pour absurdité. Face à un album concept et au rock progressif qui s’affranchit de la pesanteur des codes traditionnels, face à la créativité débordante, désarçonnante des seigneurs du prod rock/art rock, nous devons habituer notre oreille à quelque chose qui au départ peut paraître dissonant, inhabituel. Cela peut faire surgir ensuite une véritable passion envers ce dont on pouvait initialement se passer.
Prenez donc une chanson au hasard (claustrophobes., s’abstenir !) In the Cage : Rael vient juste de se réveiller dans une sorte de grotte avec une envie de déglutir (I got a Shunshine in my stomach). Complètement déboussolé. Horrible ? Absurde ? Oppressant ? Mais extraordinairement beau…
Des répétitions au clavier oppressantes, lancinantes, une voix qui exprime la solitude puis…. Des fulgurances immémorables, jouissives qui vous font décoller au synthé dans un monde cauchemardesque et pourtant si attirant… Le retour sur Terre de la gravité avec quelques sons inquiétants…. La répétition au clavier initiale qui revient en accéléré pour refléter l’enfermement progressif de la cage mais avec une addictive envie de revivre le moment.
Un morceau avant, Cuckoo Coon, nous accueille dans un cocon avec ses flûtes, son clavier, cet espoir de trouver la sortie, le sens de la vie, toujours avec un fond légèrement inquiétant.. Ce mot ‘Cuckoo Coon’ prononcé comme dans une cour de récréation avec une voix mi-étouffée, mi-lointaine… Il résonne en moi encore une semaine après. Cette œuvre musicale m’habite étrangement.
2 morceaux + tard, retrouvons Hairless Heart, un morceau instrumental planant qui me tire les larmes, dont les frissons me parcourent l’échine, me secouent d’émotion pour évoquer l’errance de Rael dans ce monde étrange et lointain de New York. Dès le morceau suivant, une vitalité musicale retrouvée, un amusement du conteur pour nous livrer la première expérience charnelle vécue et ratée pour notre héros maladroit…. Des sons distordus enfantins à 2’30», le mot ZIP répété comme si nous étions dans une cour de récréation.
The Carpet Crawlers (we’ve got to get in to get out). Un son d’une profondeur abyssale par son jeu de voix sur cette phrase. Rien à ajouter.
On continue ce voyage absurde, fantastique à travers quelques titres mais pas si dénué de sens du moins musicalement parlant ! Anyway : on se pose des questions sur la vie et la mort sur un air de piano exceptionnel. Here Comes The Surnatural Anaesthesist : à mi-chemin entre de du rock et de l’électronique d’ambiance, planant… Voyage intergalactique assuré. Directement dans l’espace pour rejoindre Apollo 13 en s’épargnant le temps de trajet en fusée.
Ensuite, je fais face à un manque de vocabulaire pour exprimer mon ressenti. Chaque son qui défile jusqu’à la fin vous emmène dans un imaginaire insoupçonnable avec des fulgurances de synthé notamment addictives.
Dans un style radicalement différent, Genesis me rappelle parfois le côté fête foraine, amusement délirant de King Crimson. C’est une véritable kermesse mi- folklorique mi- symphonique, un carnaval de sons mélodieux mais également désarçonnants parfois ! (1)
Selling England by the Pound (1973)
Les albums qui occupent les 3 premières places de cette liste des albums de Genesis classés du pire au meilleur sont tous exceptionnels et représentent non seulement le summum du rock progressif, mais aussi un point culminant pour le rock des années 70 en général. D’une part, l’excentrique et accrocheur I Know What I Like (In Your Wardrobe) de Selling England by the Pound était ce qui se rapprochait le plus d’une chanson radiophonique de Genesis à ce moment-là de l’autre, The Cinema Show (un classique de CHOM ) et The Battle of Epping Forest sont d’excellents exemples du large éventail de possibilités qu’a apporté l’ascension du prog.
A Trick of the Tail (1976)
Quand sort A trick of the Tail, la presse rock est pour le moins pessimiste. Pour certains, Genesis est tout simplement mort. Sans Peter Gabriel, l’avenir du groupe est en effet incertain. Pourtant…
Pourtant, la qualité du disque et son succès contrediront les critiques trop hâtifs. Après l’audition de dizaines de chanteurs potentiels et de nombreuses hésitations, Phil Collins consent enfin à prendre le micro. Sa voix proche du timbre de Peter, son rôle déjà clairement défini au sein du groupe, et son incroyable vitalité, font de lui le successeur idéal (du moins pour l’instant). Tony Banks révèle sa prépondérance en tant que compositeur et Steve Hackett commence à vaciller. Pourtant, le disque fonctionne. Car un autre défi que celui du remplacement de Peter se profile à l’horizon : comment poursuivre après The lamb lies down on Broadway ?
Photo : Jim C Fisk
Au final, il y a indubitablement quelque chose de cassé dans le son de Genesis. Beaucoup plus de synthés, moins d’orgue Hammond. Une production très (trop ?) lisse. Bref, un Genesis plus mûr, moins spontané que du temps de Selling England by the Pound. Cette mise en retrait des sonorités naturelles et spontanées au profit de sons plus mainstream se poursuivra sur Wind & Wuthering et conduira au fameux changement de style du groupe. Mais on ne peut pas l’imputer au départ de Peter. Il était en fait impossible de faire marche arrière après le royal exercice de The lamb… et Genesis est beaucoup trop expérimenté pour réitérer les sons juteux de sa glorieuse trilogie.
Wind & Wuthering (1976)
J’aime comment le groupe glisse doucement vers de la musique plus accessible. La théâtralité des morceaux et les expérimentations prog se font un petit peu plus discrètes que sur l’album précédent (et je sais déjà qu’elles vont disparaître d’ici quelques albums).
Mais tous ces partis pris ne se font pas au détriment de la qualité. Contrairement à ce qu’annonce la pochette, je trouve l’album plus solaire que brumeux. Et surtout, c’est la première fois que je l’entends vraiment chez Genesis. Alors je ne sais pas si c’est juste que j’y prête plus attention maintenant qu’avant, mais les lignes de basse sur cet album sont très bonnes !
Janvier 1977
En dehors de ça, Genesis est toujours un super groupe. Phil Collins a une voix stratosphérique, les autres musiciens semblent pouvoir absolument tout jouer tant les compositions et le jeu des instruments sont impeccables. La partie guitare de Blood on the Rooftops est juste sublime.
Duke (1980)
Si Duke a une apparence d’album prog (des suites de plusieurs morceaux), les sonorités sont déjà bien ancrées dans les années 1980. Que ce soit par les boites à rythmes ou la super synthétisation de Tony Banks, même si ce dernier prenait la tête du navire depuis belle lurette. Cependant, les origines prog sont toujours présentes, que ce soit par la transition atmosphérique qui ouvre Duchess (c’est quand même assez audacieux de faire une ouverture aussi calme de 2 min 10), ou bien les batteries qui n’ont pas encore connu Intruder.
Mais bien évidemment Duke’s Travels, qui se résumerait trop rapidement par batteries + solo de synthé sur cinq bonnes minutes. On conserve aussi une trame narrative, mais je vous avoue, les histoires d’amour entre Duc et Duchess, ça me touche un peu moins, malgré de beaux moments.
J’étais à Pop Rock, je débutais… Nous étions dans une nouvelle ère celle du heavy métal avec ACDC, Ozzy, Van Halen, Kiss… C’est moi qui allais aux concerts de métal, malgré tout, mon amour pour Genesis a toujours été en moi comme Chopin pour maman.
Mais parlons-en plus en détails de cette Duke suite de 28 min (sur les 55 min de l’album), qui pour moi est clairement le joyau de l’album.
Bien qu’en 6 morceaux distincts, les différents thèmes se recroisent assez souvent. Bien sûr, on a Duke’s End -morceau final- qui reprend la première piste Behind the Lines ; mais aussi le chant de Guide Vocal qui revient sur Duke’s Travel (et qui est pour moi le summum de l’album). Le riff de Turn it on Again qui revient sur le morceau final…. Et malgré les coupures de la suite (car elle a été remixée à travers l’album), une fois reconstituée, ça fonctionne à merveille !
Et les transitions fonctionnent tout aussi bien avec tout l’album ! (2)
Notes : (1). Inspiré d’un texte traduit. Nietzche était à l’étude au cégep fin des années 70. L’album double est souvent classé 2e par les fans et les critiques. Et pourtant… (2). Sur le site besteveralbum, Duke trône en 18e place devant Judas Priest, Iron Maiden et Queen.
Ricardo est chroniqueur musical pour Famille rock. Il vient de publier son 6e livre J’habite le ciel. Pour informations.
Fabriqué au Québec
Basé à Montréal, capitale mondiale du rock francophone
BANNIÈRE: MURIEL MASSÉ
WEBMESTRE: MARCO GIGUÈRE
RÉDAC’CHEF: MURIEL MASSÉ
ÉDITEUR: GÉO GIGUÈRE
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