We Know That We Like Genesis #30
Une série sur toutes les époques de ce groupe mythique
Publié le 15 juillet 2021
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Republié le 4 juillet 2023
Par André Thivierge
À l’été 1974, les membres de Genesis, Tony Banks, Phil Collins, Steve Hackett et Mike Rutherford développent, malgré les défis rencontrés avec leur chanteur Peter Gabriel, la musique de ce que deviendra une œuvre unique de leur discographie, The Lamb Lies Down On Broadway (The Lamb).
Beaucoup de musique développée à Headley Grange
Malgré les tensions entre Peter et ses acolytes, les sessions ont mené à des moments musicaux inspirés. The Waiting Room (appelé d’abord Evil Jam) provient d’une session nocturne où les musiciens ont fermé les lumières et produit d’étranges sons provenant de leurs instruments. Pendant que Steve et Tony dégageaient des bruits aigus de la guitare et du synthétiseur, Peter faisait passer sa clarinette et sa flûte dans le son circulaire de l’unité Echoplex.
Phil indique : « Il y a eu des moments mémorables. Pour moi, le meilleur de cet album est The Waiting Room. On a commencé à jouer et la seule consigne que l’on s’est donné était qu’on commençait furieusement et qu’on terminait gentiment et nous verrons ce qu’il y aura entre les deux. Je me souviens que la première fois que nous avons joué ce morceau, il pleuvait à torrents. Nous cherchions à en tirer des effets et dès que Tony a commencé à jouer quelques notes de cordes, le soleil est sorti. Il y a eu un arc-en-ciel et la pluie a cessé. Cela parait très cosmique, mais c’est ce qui est vraiment arrivé. »
Peter indique « qu’utiliser New York comme thème était très conscient. Ce qui me fascinait à propos de la ville, c’était la vitesse de celle-ci et que l’approche des classes y était totalement différente qu’en Angleterre. Et il y avait aussi la possibilité d’intéresser davantage les Américains à un héros de leur pays et d’obtenir de plus fortes réactions du public.
Tony a indiqué que The Grand Parade of Lifeless Packaging était un de ses titres favoris de The Lamb même s’il croit que la pièce aurait dû être développée davantage. Lilywhite Lilith était essentiellement une relecture de la pièce The Light. Anyway a aussi été recyclé d’un documentaire de la BBC enregistré en 1970.
Selon Tony, « les sessions étaient une chance de tenter toutes sortes de choses comme des improvisations. Nous avons apporté tous ces petits bouts de chanson et ce fut très agréable de développer le tout. On lançait une idée et on improvisait. Certaines pièces furent plus solides que d’autres. »
Pour les 4 musiciens, la plupart de leurs compositions provinrent d’improvisations, de séquences musicales au lieu de chansons qui ont eu droit à des titres de travail très évocateurs.
Tony indique : « On avait cette espèce de Chinese Jam qui est devenu The Colony of Slipperman.
Je crois que nous avions quelque chose appelé Victory at Sea qui est devenu Silent Sorrow In Empty Boat. Et nous avons eu finalement The Waiting Room que nous appelions The Evil Jam avec lequel, nous tentions de nous effrayer nous-même. Il y a aussi Sexsong qui est devenu Counting Out Time»
Tony ajoute : « Un des morceaux qui me plaisaient le plus est devenu In The Cage, chanson que je voyais plus dramatique, en ¾, mais quand on a commencé à la jouer à la batterie à 2 temps au lieu de 3, cela l’a rendue plus entraînante et excitante. Même si c’est devenu ensuite un classique de Genesis, c’était un morceau un peu méprisé de l’album, et cette première version n’est en effet pas aussi bonne que celle que nous en avons tirée plus tard. »
En entrevue exclusive, Steve Hackett commente l’inspiration musicale du nouvel album.
Famille Rock (FR): Steve, est-ce qu’il y a des moments d’inspirations qui te reviennent à l’esprit en ce qui concerne The Lamb ?
Steve Hackett (SH) : « Il y avait cette pièce qu’on appelait The Pharaohs qui n’avait pas de mélodie mais plein de potentiel et offrait un rythme à la Ben-Hur. C’est devenu Fly on The Windshield. Je pensais, oh c’est bon et la guitare est devenue cette sorte de voix qui crie et j’essayais de moduler des phrases égyptiennes qui avaient une similitude au Boléro de Ravel à la fin. ».
Tony est d’accord : « J’aime aussi particulièrement ce morceau que nous avons intitulé Fly in the Windshield, qui commence tout doucement puis éclate en fanfare avec la batterie, la guitare et le mellotron. C’est l’un des moments les plus forts de Genesis, un effet physique qui fait penser à un insecte venant s’écraser sur un pare-brise. »
FR : Il y a aussi la bizarre séquence de guitare de Counting Out Time qui sonne comme un kazoo.
SH : « Je me souviens que la guitare avait été jouée via un Synthi-High Fly. Ça a donné un son vraiment désaccordé. J’essayais d’avoir un jeu qui combinait Django Reinhardt et un hobbit. »
Dans son autobiographie, Mike se souvient : « Nous improvisions pour des heures, enregistrant tout ce que nous jouions alors que Phil gardait précieusement les cassettes. Nous écoutions ce que nous avions fait à chaque soir. C’est comme cela que nous avons trouvé l’introduction de Carpet Crawler. J’étais assis dans la cuisine un soir, buvant de la bière et écoutant les improvisations du jour. Et j’ai réentendu ce petit bout de morceau qui sur place n’était pas significatif mais à tête reposée me semblait très intéressant. »
« Je savais qu’on avait dans les mains un grand album, fort. Il y avait des bonnes chansons comme Back In New York City, très agressive et acide, la claustrophobique et suffocante In The Cage et la puissante Fly On The Windshield. »
FR : Steve, vous n’avez pas été en mesure d’enregistrer à Headley Grange.
SH : « Non, nous avons manqué de temps et nous n’avons pas pu enregistrer à Headley Grange. Et ce fut une disgrâce car nous aimions tous le son de batterie de l’album de Led Zeppelin, en particulier Kashmir, qui avait été enregistré dans les escaliers. »
Avec une importante somme de matériel à écrire et à être répété et avec Peter ayant de la difficulté à faire des progrès aves les paroles, il n’était plus possible d’enregistrer l’album à Headley Grange.
Après avoir quitté Headley Grange, Genesis s’est rendu à Glaspant Manor dans le Pays-De-Galles du Sud à la fin juillet pour enregistrer l’album dans une ferme convertie, connue plus tard comme étant le Swift Cottage. Le groupe a embauché l’unité mobile Island avec John Burns comme producteur et David Hutchins comme ingénieur de son.
Le fait d’utiliser une unité d’enregistrement dédiée à libérer le groupe des contraintes de temps habituelles de studio a aidé à la créativité des membres de Genesis. L’endroit a permis à Peter d’expérimenter les sons de voix en utilisant l’acoustique naturelle de l’édifice. Phil considérait que l’emplacement a aidé à améliorer le son de la batterie donnant une impression plus naturelle et vivante.
Ils y ont passé deux semaines, profitant de plus de liberté que dans un studio conventionnel. Burns se souvient « que nous sommes tous restés ensemble dans la ferme couchés sur des matelas au sol. Nous avions la liberté de travailler de 9h le matin à 3h dans la nuit. »
Tony se rappelle : « Utiliser un studio mobile voulait dire que nous avions plus de temps pour faire les choses. Mais comme le studio n’était pas aussi bien que cela aurait dû l’être, il y avait une sorte de bruit de fond pendant tout l’album. Grâce à John Burns, le son est finalement très bon. Quand on a réécouté les remixes plusieurs années plus tard, on a réalisé que ce qu’il y avait sur les rubans était vraiment bon. On a changé beaucoup moins de choses au son si on compare aux albums précédents. »
Les pistes de The Lamb étaient terminées en deux semaines. Toutefois, un mois après que la musique était terminée, Peter était encore en train de travailler sur les paroles. Celui-ci a demandé à ses collègues d’écrire d’autre musique pour s’adapter aux paroles qu’il était en train d’écrire.
FR : Steve, tu avais des réserves sur la manière dont l’album se développait.
SH : « Ma participation à l’écriture de l’album n’était pas ce que j’avais souhaité, exception faite de Fly On The Windshield. » Lors d’une entrevue avec Circus Magazine en juin 1978, il affirmait, « J’étais assez fâché de voir comment l’album évoluait. Je l’ai dit à Peter et il m’a répondu, « Je m’en fous. »
FR : Le retour de Peter n’a pas assaini le climat
SH : « Il y avait encore beaucoup de ressentiment et je ne me suis pas senti relax pendant la finalisation de l’album. Le tout était en train de devenir un monstre, un album concept, double dont j’étais opposé à ce moment-là. »
De retour à Londres pour le mixage
La finalisation de l’enregistrement et le mixage de l’album ont pris place au Studio Island sur la rue Basing à Londres. Le temps supplémentaire a permis à Peter de compléter les paroles de quelques chansons. Les membres du groupe ont œuvré jours et nuits pour finaliser l’album, prenant à tour de rôle les horaires de jours et de nuit.
Phil raconte l’ambiance dans son autobiographie : « Lors des séances de mixage, un schisme se dessine entre le Genesis de jour et celui de nuit. Peter et moi, on mixe parfois jusqu’à 2 heures du matin. Le lendemain, Tony trouve ça nul et fait le ménage. Parfois, on en est encore à enregistrer alors qu’on devrait mixer. Le temps presse, l’ambiance est tendue et tout le monde est crevé. Il y a trop de musique, trop de texte et on finit dans la précipitation. Les nuances narratives échappent à tout le monde (y compris soupçonnons nous Peter). »
Un invité inattendu participera à l’album
Durant le mixage, les membres du groupe ont appris que Brian Eno, était en train d’enregistrer son 2e album, Taking Tiger Mountain (By Strategy) sur l’étage supérieur du studio. Peter l’a approché pour lui demander s’il pouvait appliquer les effets spéciaux dont il s’est spécialisé sur sa voix sur certaines chansons. Il a accepté à la condition de pouvoir utiliser Phil sur son propre album. Eno a reçu un crédit “d’Ennosification”, ce qui irrita Tony au plus haut point, croyant qu’il a pris un plus grand rôle dans le processus créatif que dans la réalité.
Tony croit que la contribution de Brian Eno était plus artificielle qu’autre chose. « Il a utilisé l’Echoplex et a joué avec ceci dans certaines introductions. Il a modifié les voix de Grand Parade et In The Cage. Mais il n’a rien joué. Ce n’était que des effets. Et c’est arrivé pendant que j’étais absent. J’étais furieux ! »
Phil s’en souvient dans son autobiographie : « Pendant qu’on travaille sur nos mixes de The Lamb à Londres, on apprend que Brian Eno enregistre à l’étage au-dessus son deuxième album solo. Je ne suis pas un fan de Roxy Music, mais mes collègues adorent. Peter monte le saluer et lui demande s’il pourrait traiter certaines de nos voix sur ses bidules. En contrepartie, Eno me sollicite pour jouer sur un de ses morceaux, Mother Whale Eyeless. J’accepte et lui et moi, on accroche tout de suite. Je finirai par jouer sur trois de ses albums. »
À quoi ressemble le résultat final ?
À suivre, une analyse des onze chansons du premier disque de The Lamb Lies Down On Broadway par les membres de Genesis et le chroniqueur.
Fabriqué au Québec!
Basé à Montréal, capitale mondiale du rock francophone!
BANNIÈRE: THOMAS O’SULLIVAN
WEBMESTRE: MARCO GIGUÈRE
RÉDAC’CHEF: MURIEL MASSÉ
ÉDITEUR: GÉO GIGUÈRE
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